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Chapitre 2 : Matrices carrées


Dans ce chapitre K désigne R ou C , n un entier naturel non nul.

I Trace

I.1 Trace d'une matrice

I.1.1 Définition

Soit A=(ai,j)(i,j)1,n2Mn(K) . On appelle la trace de A et on note Tr(A) le nombrei=1nai,i qui est la somme de ses coefficients diagonaux.
I.1.2 Exemple
Pour A=(aij)Mn(K) , calculer Tr(ATA) .
I.1.3 Proposition

Soient A,BMn(K) .
  1. Tr(AT)=Tr(A)
  2. α,βK Tr(αA+βB)=αTr(A)+βTr(B) .
Ainsi la trace est une forme linéaire : TrL(Mn(K),K)
I.1.4 Exercice
Montrer que le noyau de la trace est un hyperplan et en donner une base. On pourra commencer par traiter le cas des matrices carrées de tailles 2.
I.1.5 Effet du produit
Montrer que dans le cas général on a pas Tr(A2)=Tr(A)2 .

I.2 Trace d'un endomorphisme

I.2.1 Théorème (Trace d'un produit)

Soient AMn,p(K) et BMp,n(K) ( remarquer les tailles ). Tr(AB)=Tr(BA)
Preuve
Notons C=ABMn(K) et D=BAMp(K) avec A=(ai,j),B=(bi,j) et C=(ci,j),D=(di,j) .
Pour (i,j)1,n2 on a ci,j=k=1pai,kbk,j et donc Tr(C)=i=1nk=1pai,kbk,i=k=1pi=1nbk,iai,k en échangeant les sommes.
De la même manière, Tr(D)=i=1pk=1nbi,kak,i . Au nom des indices près ( qui sont des variables muettes, rappelons le ) on a bien Tr(C)=Tr(D) .
I.2.2 Exercice
Montrer que Tr(ATB)=Tr(ABT) , dans le cas de matrices carrées, avec les notations du théorème.
En déduire la valeur de cette trace dans le cas où A est symétrique et B anti-symétrique.
I.2.3 Définition
Soient A,BMn(K) deux matrices carrées.
On dit que A et B sont semblables ssi il existe une matrice inversible PGLn(K) telle que A=P1BP .
I.2.4 Lever l’ambiguïté
La définition précédente n'est pas bien formulée !
En effet, la formule donnée n'est pas symétrique en première lecture, alors qu'on dit que `` A et Bsont semblables'' (ce qui implique que A est semblable à B et B semblable à A ).
Une lecture plus éclairée montre qu'avec les notations de la définition, si on peut écrire A=P1BP alors on a aussi B=PAP1=Q1AQ en posant comme matrice inversible la matrice Q=P1 .
I.2.5 Matrices semblables
Si A,BMn(K) sont semblables alors Tr(A)=Tr(B) .
En effet, si on a A=P1BP pour une matrice inversible P (voir P comme une matrice de passage), alors Tr(A)=Tr((P1B)B)=Tr(P(P1B))=Tr(B) .
I.2.6 Invariants
On peut maintenant dire que deux matrices semblables ont :
  1. le même rang
  2. la même trace
I.2.7 Définition-proposition

Soit E un K -espace vectoriel de dimension n et fL(E) . Le scalaire Tr(MatB(f)) ne dépend pas de la base B de E choisie pour calculer la matrice. On le note Tr(f) .
I.2.8 Exemple

Soit f:{R3[X]R3[X]PXP . Calculer Tr(f) .
I.2.9 Exercice
Soit p un projecteur dans E de dimension finie. Montrer que Tr(p)=rg(p) .
I.2.10 Linéarité
Pour f,gL(E) et α,βK on a Tr(αf+βg)=αTr(f)+βTr(g) .

II Déterminant

II.1 Déterminant de taille n

II.1.1 Définition-proposition

Il existe une unique application det:Mn(K)K telle que
  1. det(In)=1
  2. det est linéaire par rapport à chaque colonne.
  3. det est anti-symétrique ie change de signe si on échange deux colonne de sa variable.
II.1.2 Conséquences de la définition
Notons C1,,Cn les colonnes de la matrice AMn(K) .
  • Si on a Ci=0 pour un certain i alors det(A)=0 par linéarité par rapport à la i ème colonne.
  • Si on a Ci=Cj pour ij alors det(A)=det(A) par échange de ces deux colonnes donc det(A)=0 .
II.1.3 Exemple

Calculer d=|742318|
On voit que C2=6C1 et donc d=6|7733|=0 d'après la deuxième remarque de II.1.2
II.1.4 Cas n = 2
On trouve par linéarité par rapport à chaque colonne que


|abcd|=a|1b0d|+c|0b1d| car (ac)=a(10)+c(01)=a(b|1100|+d|1001|)+c(b|0110|+d|0011|)=adbc

après un échange de colonne et d'après II.1.2 .
Ce calcul, bien que pénible, permet de retrouver la règle de Sarrus dans le cas n=3 et explique l'unicité dans la définition. Reste l'existence...
II.1.5 Interprétation géométrique
En dimension 2 : il s'agit de l'aire (algébrique, ie on obtient un nombre négatif dans le cas d'un sens indirect) d'un parallélogramme

En dimension 3 :il s'agit du volume (algébrique) d'un parallélépipède. Dans la figure suivante, on construit un parallélépipède sur les 3 vecteurs AB,AC,AD et |det(AB,AC,AD)| (où les coordonnées sont calculées dans la base canonique) vaut le volume du parallélépipède.
II.1.6 Notation
Comme en dimension 2 et 3, on note un déterminant sous forme d'un tableau de nombre entouré de barres verticales.
II.1.7 Proposition (Opérations sur les déterminants)
Soit AMn(K) . On fait subir une opération élémentaire sur les colonnes de A et on note A la matrice obtenue.
  1. Si l'opération est CiCj avec ij alors det(A)=det(A) .
  2. Si l'opération est CiλCi avec λ0 alors det(A)=λdet(A)
  3. Si l'opération est CiCi+λCj avec λK et ij alors det(A)=det(A) .
II.1.8 Corollaire
Soit AMn(K) et λK alors det(λA)=λndet(A)
II.1.9 Calcul en pratique
Soit AMn(K) . On réduit A par colonnes pour calculer son déterminant. Attention aux opérations d'échange ou de multiplication par un scalaire.
II.1.10 Exemple

Calculer |011112111|
II.1.11 Théorème

Soit AMn(K) . A est inversible ssi det(A)0 .
Preuve
En reprenant les notations de II.1.7 , on remarque que det(A)=0det(A)=0 Réduisons la matrice par colonne et notons R la matrice réduite. On a det(R)=0det(A)=0 .
AGln(K)R=In . Ainsi si AGLn(R) alors det(A)0 car det(In)=10 .
Supposons au contraire que AGLn(K) . Alors R possède au moins une colonne nulle (autant que la dimension du noyau de A d'ailleurs) et det(R)=0 donc det(A)=0 .
II.1.12 Remarque
Le déterminant est toujours une expression polynomiale des coordonnées (s'exprime comme produits et sommes des coordonnées de la matrice)
II.1.13 Exemple
Calculer le déterminant de (2113012100120003) .
Notons Δ ce déterminant. On factorise la première colonne par 2 puis on effectue les opérations C2C2C1 , C3C3+C1 , C4C43C1 et alors Δ=2|1000012100120003| On effectue maintenant C3C3+2C2 et C3C3+C2 et alors Δ=2|1000010000120003| on peut maintenant factoriser par 1 la colonne C3 puis effectuer l'opération C4C42C3 pour obtenir Δ=2×(1)|1000010000100003| Il reste à factoriser par 3 la dernière colonne et Δ=2×(1)×3=6
II.1.14 Théorème

Le déterminant d'une matrice triangulaire est le produit de ses coefficients diagonaux.
Preuve
Remarquer que le déterminant est nul ssi un des coefficient diagonaux est nul ssi la matrice triangulaire n'est pas inversible.
Dans ce cas d'une matrice inversible, le calcul est direct, sur le même modèle que l'exemple, que la matrice soit triangulaire inférieure ou supérieure.
II.1.15 Exemple
Trouver à quelle condition sur aC la matrice A=(a1a1a11a2a) est inversible.
Après l'opération C3C3C1 on a det(A)=|a101a01a2a+1| Après C1C1aC2 on obtient det(A)=|0101a2a01a3a2a+1| Après échange des deux premières colonnes, on obtient une matrice triangulaire et donc det(A)=1×(1a2)×(a+1)remarquer le signe - dû à l'échange de colonnes.
Finalement AGL3(C)det(A)0a±1 .
II.1.16 Méthode
Une première méthode de calcul du déterminant :
  1. Echelonner la matrice par opérations élémentaires (attention à la valeur du déterminant qui change parfois)
  2. Calculer le produit des coefficients diagonaux.

II.2 Propriétés calculatoires

II.2.1 Théorème

Soient A,BMn(K) . det(AB)=det(A)det(B). Plus généralement, le déterminant d'un produit de matrices est égal au produit des déterminants.
Preuve
Si A n'est pas inversible, AB non plus et donc le résultat est vrai.
Sinon, considérons f{Mn(K)K(C1,,Cn)det(AC1,,ACn)det(A) .
Si M est de colonnes C1,,Cn , alors le numérateur est exactement det(AM) .
Remarquons maintenant que f(In)=1 , et si on échange deux colonne de M , f change de signe. De plus, f est linéaire par rapport à chaque colonne par composition et produit par une constante ( XAXL(Kn) et le déterminant est linéaire par rapport à cette colonne).
Ainsi f=det (par l'unicité du déterminant) et f(B)=det(AB)det(A)définition de f=det(B)
On prouve l'affirmation générale par une récurrence immédiate.
II.2.2 M-Attention
On a surtout pas det(A+B)=det(A)+det(B) .
II.2.3 Corollaire
Si A est inversible alors det(A1)=1det(A) .
Dans ce cas, on a également kZ det(Ak)=det(A)k
Preuve
On a directement det(A)det(A1)=1 ce qui prouve le cas k=1 , le seul qu'il manquait dans le théorème précédent.
II.2.4 Théorème
Soit AMn(K) . Alors det(A)=det(AT) .
Preuve
Hors programme
  1. On a AGLn(K)ATGLn(K) . Ainsi det(A)=0det(AT)=0 . Dans toute la suite on suppose que A est inversible.
  2. Soit λK . Rappelons que les matrices élémentaires sont d'un des trois type suivant : Ei,λ=diag(1,,1,λ,1,,1) (le λ0 en i ème position, cette matrice traduit l'opération LiλLi ), Ei,j qui est la matrice In ayant subit l'opération LiLj (traduit la dite opération) ou Ei,j,λ qui la matrice In ayant subit l'opération LiLi+λLj .
    Un calcul direct montre que Ei,λT=Ei,λ et donc ces deux matrices ont le même déterminant, det(Ei,j)=1=det(Ei,jT) (à calculer par un échange de colonnes pour retrouver l'identité) et det(Ei,j,λ)=1=det(Ei,j,λT) (ces matrices sont triangulaires, l'une inférieure l'autre supérieure et avec des 1 sur la diagonale).
    Ainsi le théorème est vrai pour les matrices élémentaires.
  3. Rappelons que l'on suppose A inversible. Alors on peut écrire A=ErEr1E1 , un produit de matrices élémentaires.
    Alors AT=E1TE2TErT . Le théorème II.2.1 , ainsi que le point précédent permettent de conclure à l'égalité souhaitée.
II.2.5 Conséquences
On peut maintenant effectuer des opérations élémentaires sur les lignes au même titre que sur les colonnes, avec les mêmes effets.
II.2.6 Théorème

Soit AMn(K) avec n2 , A=(ai,j)(i,j)1,n2 . Pour i,j1,n2 on note Ai,j la matrice de Mn1(K) déduite de A en supprimant la i ème ligne et la j ème colonne.
  1. det(A)=i=1n(1)i+jai,jdetAi,j (développement par rapport à la j ème colonne)
  2. det(A)=j=1n(1)i+jai,jdetAi,j (développement par rapport à la i ème ligne)
Preuve
Admis. Une idée de preuve (un peu pénible, mais pas si difficile) : on reprend les notations de II.1.7 et on prouve le premier point pour j fixé. On prouve alors que l'application de la formule à A est l'opposé de celle à A pour un échange de colonne et donne le même résultat pour une combinaison de colonnes. Ainsi la formule est vraie pour A ssi elle l'est pour A . Il suffit ensuite de réduire A et de remarquer que la formule est triviale pour l'identité.
II.2.7 Tableau des signes
On résume souvent les signes qui apparaissent dans cette formule par |+++|
II.2.8 Exemple
Calculer le déterminant d=|1142124121801051| On effectue C3C34C1 et on développe par rapport à la 3 ième colonne : d=|112121210|=|350121210|=(3×12×(5))=13 .
II.2.9 Méthode
Une deuxième méthode de calcul du déterminant : Appliquer bêtement une des formules précédente.
Une bonne idée sera de faire apparaître des 0 sur une ligne ou colonne pour réduire le nombre de termes dans le développement.
II.2.10 Exemple
Calculer le déterminant dn=|32001320000132013|[n] . Pour n=1 il s'agit d'un nombre et d1=3 . Pour n=2 , un calcul direct donne d2=7 .
On effectue, pour n3 un développement par rapport à la première colonne. dn=(3)dn11×|20001320000132013|[n1] et un développement par rapport à la première ligne donne maintenant dn=3dn12dn2 Il s'agit d'une suite récurrente linéaire d'ordre 2, dont les racines de l'équation caractéristiques ( r2=3r2 ) sont 1 et 2 . En utilisant les deux conditions initiales précédente, on trouve dn=2(2)n(1)n pour tout n1 .
II.2.11 Corollaire
Soit AMn(C) . Alors det(A¯)=det(A)¯ .
Preuve
Immédiat par récurrence sur la taille de A et utilisant les propriétés calculatoires de la conjugaison (somme, produit).

II.3 Déterminant et espace vectoriel

II.3.1 Définition

Soit E un K -ev de dimension n et F=(u1,,un) une famille de n vecteurs. Soit B une base. On appelle déterminant de F dans la base B le nombre detB(u1,,un)=det(MatB(u1,,un)) .
II.3.2 Lien avec la géométrie
Ce que l'on appelait déterminant d'une famille dans R2 ou R3 est en fait le déterminant dans la base canonique. Rappel : dans R2 , det(u,v)=0 ssi u,v sont colinéaires.
II.3.3 Proposition

Soit B une base de E et B une famille de n vecteurs.
B est une base de E ssi detB(B)0
II.3.4 Exercice
Que vaut detBB dans ce cas ?
II.3.5 Exemple
Montrer que ((nk)Xk(1X)nk)k0,n est une base de Kn[X] . Dans la base canonique, la matrice est triangulaire supérieure et on peut calculer son déterminant par produit des coefficients diagonaux.
II.3.6 Théorème

Deux matrices carrées semblables ont le même déterminant.
Preuve
Posons a A=P1BP pour A,BMn(K) et PGLn(K) .
On a alors det(A)=det(P1)det(B)detP=1det(P)det(P)det(B)=det(B) .
II.3.7 Invariants
Nous voilà avec 3 invariant de changement de base pour les endomorphismes : le rang, la trace et le déterminant.
II.3.8 Définition

Soit fL(E) avec E un K -ev de dimension n . Toutes les matrices de f (ie dans n'importe quelle base) ont le même déterminant, on le note det(f) et on l'appelle déterminant de f .
II.3.9 Exemple
On considère l'application T:{M2(R)M2(R)MMT . Calculer son déterminant.
En prenant M1=(1001),M2=(0010)M3=(0100) et M4=(0001) , B=(M1,M2,M3,M4) la base canonique de M2(R) , on a MatB(T)=(1000001001000001) Après un échange de colonne, det(T)=1 .
II.3.10 Proposition

Soient f,gL(E) avec E de dimension n .
  1. det(IdE)=1
  2. Pour λK , det(λf)=λndet(f) .
  3. det(fg)=det(f)det(g)
  4. f est bijective (on dit aussi inversible) ssi det(f)0 et alors det(f1)=1det(f) .
II.3.11 Puissances
On a directement det(fn)=det(f)n qui est valable par récurrence pour tout nN et même nZ si f est bijective.