Les produits et puissances de matrices sont beaucoup plus aisés sur les matrices diagonales.
Endomorphismes
Nous avons constaté que certains endomorphismes ont une matrice diagonale pour un bon choix de base
.
Traduction sur la base
Soit
un
-espace vectoriel de dimension 3.
Soit
et
une base de
. On suppose que
.
Traduisons cette hypothèse :
.
Noyaux
Poursuivons notre analyse de la situation précédente.
On a
qui vérifie
ie
.
Or
fait partie d'une famille libre donc est non nul.
Ainsi
, ou encore l'endomorphisme
n'est pas bijectif.
De même
ne sont pas bijectifs.
I Elements propres
I.1 Valeurs et vecteurs propres
Les deux définitions suivantes sont équivalentes
I.1.1 Définition (Valeur propre et vecteur propre)
Soit
un
-espace vectoriel et
.
Soit
.
On dit que
est une valeur propre de
ssi il existe un
non nul
tel que
.
Un tel
non nul
est appelé un vecteur propre de
associé à la valeur propre
.
L'ensemble des valeurs propres de
est appelé le spectre de
et noté
.
I.1.2 Définition (Vecteur propre et valeur propre)
Soit
un
-espace vectoriel et
.
Soit
. On dit que
est un vecteur propre de
ssi
On dit que
est un vecteur propre de
associé à la valeur propre
.
I.1.3 Exemple
On prend
et
.
Trouvons les valeurs propres de
.
Soit
. On se demande s'il existe une fonction
qui n'est pas la fonction nulle telle que
ou encore
.
La réponse est oui, par exemple
. On connaît même toutes les solutions :
où
.
Conclusion : tout réel est valeur propre de
ou encore
I.1.4 Proposition
Soit
un
-espace vectoriel et
.
Soit
. Alors on a
Preuve
Pour
on a
.
Ainsi il existe un tel
non nul ssi
I.1.5 Définition
Soit
.
Soit
.
On dit que
est une valeur propre de
ssi il existe un
non nul
tel que
.
Un tel
non nul
est appelé un vecteur propre de associé à la valeur propre
.
En résumé : les valeurs propres et vecteurs propres de
sont les valeurs propres et vecteurs propres de l'application linéaire canoniquement associée à
,
.
On note
le spectre de
(l'ensemble de ses valeurs propres)
I.1.6 Exemple
Soit
.
Trouver les valeurs propres de
. Soit
. On cherche s'il y a une solution non nulle
.
Posons
.
.
Un système linéaire homogène possède une solution non nulle ssi sa matrice n'est pas inversible.
Ainsi
est une valeur propre ssi
ssi
ssi
ssi
.
Finalement, les valeurs propres de
sont
,
I.1.7 Remarque
Pour
et
, on a
I.2 Espaces propres
I.2.1 Définition
Soit
et
une valeur propre de
.
L'espace propre associée à
est l'espace
.
Il s'agit de l'ensemble composé du vecteur nul et de tous les vecteurs propres associés à
. On le note parfois aussi
.
Soit
et
une valeur propre de
. L'espace propre associée à
est l'espace
.
I.2.2 Éléments propres
Les éléments propres d'un endomorphisme ou d'une matrice sont : ses valeurs propres et les espaces propres associés.
I.2.3 Noyau
est injective ssi
n'est pas valeur propre de
.
De manière plus générale,
est valeur propre de
ssi
n'est pas injective.
I.2.4 Exemple
On reprend l'exemple
I.1.6
. Calculons
.
D'après notre analyse,
. On trouve le système
dont l'ensemble des solutions est
.
Ainsi
.
On résout de même
. On obtient le système
. Ainsi
.
Remarquons que
est une base de
(famille libre de 2 vecteurs. Elle est en plus orthogonale et indirecte).
Notons
l'endomorphisme canoniquement associé à
. Alors
est une matrice diagonale. Ici, l'endomorphisme est canoniquement associé donc on a
.
I.2.5 Remarque
Si
est une valeur propre de
, alors
.
I.2.6 Exemple
Vérifier que
est une valeur propre de
et calculer
.
On montre facilement que le rang de
est 2 (retrancher
à chaque autre colonne pour commencer). Ainsi on trouve un espace propre
de dimension
I.2.7 Inversibilité
est inversible ssi
ssi
n'est pas valeur propre de
.
I.2.8 Théorème
Soit
et
des valeurs propres 2 à 2 distinctes de
.
Pour
⟦⟧
on pose
un vecteur propre associé à
(il est donc non nul).
La famille
est libre.
Preuve
Le cas
est évident (une famille de 1 vecteur est libre ssi le vecteur est non nul)
Supposons le théorème vrai pour
valeurs propres distinctes. Prenons
vecteurs propres associés à des valeurs propres 2 à 2 distinctes. Soient
tels que En composant par
on obtient En calculant
on obtient
. Or, par hypothèse de récurrence, la famille
est libre. Ainsi pour
⟦⟧
on a
. Comme
, on a
. Il reste à voir que
avec
(la moindre des choses pour un vecteur propre !). Finalement, la famille
est libre.
Par récurrence, pour tout
,
vecteurs propres associés à
valeurs propres distinctes deux à deux forment une famille libre.
I.2.9 Exemple
La famille
est libre car toute sous famille finie est libre.
I.2.10 Exercice
Montrer que
est libre.
I.2.11 En dimension finie
Si
, un endomorphisme de
ne peut pas avoir plus de
valeurs propres distinctes.
I.2.12 Théorème
Soit
et
des valeurs propres 2 à 2 distinctes de
.
La somme
est directe ie
Preuve
Soient
.
On suppose que
. On doit montrer que tous les
sont nuls. Or des vecteurs propres associés à des valeurs propres distinctes forment une famille libre d'après le résultat précédent. Ainsi une somme de vecteurs propres associés à des valeurs propres distinctes ne peut être nulle.
On en déduit qu'aucun des
n'est un vecteur propre et qu'ils sont donc tous nuls.
I.2.13 Exemple
Soit
un plan de
et
une droite non contenue dans
. Alors
.
Soit
le projecteur sur
parallèlement à
. On a
et
et on a bien
.
I.3 Stabilité ( )
I.3.1 Proposition
Soit
.
Si
est une droite de
stable par
, alors
est dirigée par un vecteur propre de
.
Preuve
Supposons qu'on ait
pour une droite
ie. que la droite
est stable par
.
Notons
pour un
(qui dirige
). Alors
donc
pour un certain
.
Ainsi
est un vecteur propre de
associé à la valeur propre
.
On a même
.
I.3.2 Proposition
Soit
et
une valeur propre de
.
Alors
est stable par
.
Preuve
Soit
. Alors
par définition et donc
(stabilité par produit par un scalaire).
I.3.3 Endomorphisme induit
Dans le cadre de la proposition, on note
.La restriction de l'ensemble d'arrivé a du sens d'après la proposition précédente.
Pour tout
on a
.
Ainsi
.
En résumé : la restriction d'une application linéaire à un espace propre est une homothétie.
Si
est de dimension finie, on peut trouver
un supplémentaire de
et la matrice de
est alors de la forme
I.3.4 Proposition
Soient
tels que
.
sont stables par
.
Tout espace propre de
est stable par
.
Evidemment, on peut échanger les rôles de
dans ces résultats.
Preuve
Soit
. Montrons que
. Or
. Donc
. Soit
. Notons
. Alors
.
Pour
,
donc
est stable par
d'après le point précédent.
I.3.5 Proposition
Soient
. On suppose
.
Toute droite propre de
est aussi une droite propre pour
et toute droite propre pour
est une droite propre pour
.
II En dimension finie
Dans toute la suite du chapitre,
désigne un
-espace vectoriel de dimension
.
II.1 Rappels sur la bijectivité et l'inversibilité
II.1.1 Proposition
Soit
un
-espace vectoriel de dimension
et
.
On a les équivalences suivantes
II.1.2 Proposition
Soit
.
Notons
les colonnes de
et
ses lignes.
On a les équivalences suivantes
II.2 Polynôme caractéristique
II.2.1 Définition-proposition
Soit
. Le polynôme caractéristique de
est le polynôme
associée à la fonction
.
est un polynôme
unitaire
(son coefficient dominant est 1) de
degré
, la taille de
.
Preuve
On doit prouver que
est polynomiale de degré
et unitaire.
Notons
les colonnes de
Pour
⟦⟧
, on pose
la propriété : pour
,
est une fonction polynomiale de degré au plus
et le coefficient de
est
.
Pour nos calculs, fixons
qui est bien degré au plus 1 et le coefficient de
est
.
Supposons
vérifiée pour un
⟦⟧
. Alors
On peut appliquer l'hypothèse de récurrence à chacun des deux déterminants (avec deux familles de colonnes différentes) :
sont polynomiale de degré au plus
donc
est de degré au plus
et le coefficient de
est le coefficient de
dans
, ie
(toujours par hypothèse de récurrence).
Par récurrence,
est vraie pour tout
⟦⟧
.
En appliquant le résultat précédent aux colonnes de
, on trouve que
est polynomiale de degré au plus
et le coefficient de
est
.
II.2.2 Exemple
Calculer sous forme factorisée le polynôme caractéristique de
.
Pour
,
.
On a sommé toutes les colonnes dans
.
Ainsi
.
II.2.3 Proposition
Soit
. Le coefficient constant de
est
et le coefficient de
est
.
Ainsi
Ce résultat est également valable pour les endomorphismes.
Preuve
On a en effet
qui est bien le coefficient constant.
Pour la trace, voir la fin du chapitre.
II.2.4 Exemple
Si
alors
.
II.2.5 Matrices semblables
Soient
deux matrices semblables. Posons
telle que
. Soit également
Alors
. Ainsi
et
sont semblables et ont donc le même déterminant, ie
II.2.6 Définition
Soit
, où
est de dimension
. Le polynôme caractéristique
de
est le polynôme associé à l'application
. C'est un polynôme unitaire de degré
.
Si
est la matrice de
dans une base
quelconque de
alors
.
II.2.7 Exemple
On considère
. Calculer
. On trouve immédiatement
.
II.3 Lien avec les valeurs propres
II.3.1 Théorème
Soit
et
. Soit
est une valeur propre de
ssi
ie
est une racine de
.
est une valeur propre de
ssi
ie
est une racine de
.
Preuve
Les deux énoncés sont équivalents. Prouvons le premier.
II.3.2 Cas des matrices triangulaires ou diagonales
Rappelons qu'un déterminant triangulaire se calcul par produit des éléments diagonaux.
On en déduit que pour une matrice triangulaire (et donc pour une diagonale), les valeurs propres se lisent sur la diagonale.
II.3.3 Exemple
Donner les éléments propres de
II.3.4 Déterminer les éléments propres
On procède comme suit :
Calculer le polynôme caractéristique
Trouver les racines dudit polynôme
Calculer les espaces propres qui correspondent.
II.3.5 Exemple
Trouver les éléments propres de
.
On a
donc les valeurs propres de
sont
.
Calcul de
. Soit
.
ssi
ssi
ssi
(on remarque que la deuxième ligne est forcément proportionnelle à la première car
est valeur propre donc
. Ici le facteur est
). Ainsi
.
Calcul de
. On trouve
.
II.3.6 Théorème (Rappel : d'Alembert-Gauss)
Soit
.
Si
est non constant, alors
possède un moins une racine dans
.
Si
est non nul, il possède exactement autant de racine dans
(comptées avec multiplicités) que son degré. On dit que
est
scindé
.
Conséquence ici : Toute matrice
possède au moins une valeur propre.
Preuve
Admis, comme en sup.
II.3.7 Proposition (Déterminant triangulaire par bloc)
Soit
de la forme
où
sont des matrices carrées (de tailles quelconques, y compris 1). Alors
.
Preuve
Notons
(ie notons
la taille de
).
Si
, alors le résultat est simplement l'application du développement par rapport à la première colonne.
Supposons le théorème vrai pour les matrices
de taille
. Montrons le pour
de taille
Si la première colonne de
est nulle alors
et la formule est vérifiée.
Si
alors on élimine tous les termes de la première colonne de
par opérations élémentaires sans changer ni la valeur de
ni celle de
. Notons
la matrice obtenue après opérations puis en retirant les premières lignes et colonnes de
. On a alors
et
. par hypothèse de récurrence.
Si
, on échange deux lignes dans
(et dans
) pour placer un coefficient non nul en position
. Ceci oppose à la fois
et
. On est maintenant revenu au cas précédent, sauf que l'on calcule
.
Par récurrence, le théorème est vrai pour toute taille de la matrice
.
II.3.8 Théorème
Soit
et
. Notons
la multiplicité de
comme racine de
(on appelle cette quantité la multiplicité de la valeur propre
).
Preuve
est une valeur propre de
donc
et donc
.
Soient
une base de
. On complète cette base en
une base de
. Alors
où
sont des matrices.
Ainsi, pour
,
.
Ainsi
est racine de multiplicité au moins
de
.
II.3.9 Corollaire
Si
est une racine simple de
ou
, alors
est une droite.
II.3.10 Exemple
Reprendre
II.2.2
et calculer les espaces propres. On trouve
II.3.11 Exemple
Trouver un exemple où
. Prendre une matrice diagonale, ou une projection.
III Diagonalisation
Rappel :
est toujours un
-espace vectoriel de dimension finie
.
III.1 Diagonalisabilité
III.1.1 Définition
Soit
. On dit que
est
diagonalisable
ssi il existe une base
de
telle que
est diagonale.
Soit
. On dit que
est diagonalisable ssi
est semblable à une matrice diagonale (il existe une matrice inversible
et une matrice diagonale
telles que
.)
III.1.2 Exemple
Les projecteurs et symétries.
III.1.3 Proposition
Soit
.
est diagonalisable ssi il existe une base
de
composée de vecteurs propres de
.
Dans ce cas
est diagonale et sa diagonale est composée des valeurs propres de
associées aux vecteurs propres de
(
les valeurs propres sont dans l'ordre des vecteurs de
).
Preuve
Simple traduction.
III.1.4 Proposition
Soit
.
est diagonalisable ssi il existe une base
composée de vecteurs propres de
. En notant
la base canonique de
et
la matrice dont les colonnes sont les vecteurs propres de
on a
et la diagonale de
est composée des valeurs propres de
associées respectivement aux vecteurs propres de
(dans le même ordre).
On a alors
.
Preuve
Il s'agit de la traduction sur
du théorème précédent.
III.1.5 Influence de
Comme on l'a vu en pratique, il peut être insuffisant de chercher à diagonaliser un
-endomorphisme sur
. On peut parfois considérer
comme un
-espace vectoriel (polynôme, matrices, colonnes) si cela est autorisé par l'énoncé.
III.1.6 Exemple
La matrice de
II.2.2
n'est pas diagonalisable. En effet les seuls vecteurs propres de
sont dans
. Si on prend 3 vecteurs propres, au moins deux appartiennent à l'une des deux droites
donc la famille est liée.
La matrice de
II.3.5
est diagonalisable dans
mais pas dans
. Si
et
alors
.
Remarquez qu'on a
.
III.1.7 Théorème
Soit
.
est diagonalisable ssi
.
Preuve
On sait déjà qu'une somme d'espace propres est directe et donc a priori
.
Supposons
. Alors la concaténation de bases des
est une base de
qui est composée de vecteurs propres (des vecteurs
non nuls
des
car ils se trouvent dans des familles libres).
Réciproquement, supposons
diagonalisable. Soit
une base dans laquelle
est diagonale. Elle est composée de vecteurs propres par définition des vecteurs propres (encore une fois, des vecteurs d'une famille libre sont forcément non nuls). Ainsi pour tout
⟦⟧
,
(il est dans l'un des espaces de la somme).
contient donc une base de
donc
ce qui prouve l'égalité de ces ensembles.
III.1.8 Théorème
Soit
.
est diagonalisable sur
ssi
est scindé sur
et pour tout
on a
(la multiplicité de
en tant que racine de
).
Preuve
Supposons
diagonalisable. Alors
, ainsi
. Or on a également
(un polynôme de degré
ne peut pas avoir plus de
racines dans
). Ainsi
est scindé. De plus,
et donc tous les nombres de cette somme sont nuls.
Réciproquement, supposons
scindé et
de dimension maximale pour tout
. Alors
et
ce qui prouve l'égalité de ces deux espaces vectoriels et donc la diagonalisabilité de
d'après le théorème
III.1.7
III.1.9 Remarque
On a prouvé au passage que
est diagonalisable ssi la somme des dimensions des espaces propres vaut
.
III.1.10 Exemple
Montrer que
canoniquement associée à
est diagonalisable.
On calcule
pour
et on trouve
. Ainsi
est scindé sur
et ses racines sont
(racine double) et 3 (racine simple). Alors on a forcément
et donc
. De plus, après résolution de l'équation
d'inconnue
, on trouve
qui est un espace de dimension
. Finalement,
est bien diagonalisable.
Montrer que
est diagonalisable. On trouve immédiatement que
. Ainsi
est scindé et ses deux racines sont 0 et 2 et sont simples. Or pour une racine simple
on a forcément
et donc
et finalement
est bien diagonalisable.
III.1.11 Proposition
Soit
. SI
est scindé sur
et à racines simples ALORS
est diagonalisable.
Preuve
Il s'agit du raisonnement finissant l'exemple précédent.
III.1.12 Remarque
Cette condition n'est absolument pas nécessaire : prendre une projection sur un plan de
.
III.1.13 Traduction sur les matrices
Elle est immédiate. Soit
est diagonalisable ssi il existe une base
de
composée de vecteurs propres de
.
Si on note
la matrice de passage de la base canonique à
alors
est diagonale.
est diagonalisable ssi
.
est diagonalisable sur
ssi
est scindé sur
et pour tout
.
SI
est scindé sur
et à racines simples ALORS
est diagonalisable.
III.2 Applications
III.2.1 Calcul de puissances
Soit
et
Si
est un vecteur propre de
associée au scalaire
alors
et
Si
est diagonalisable sous la forme
alors
.
III.2.2 Matrices particulières
Soit
une matrice nilpotente d'ordre
. Soit
une valeur propre complexe de
et
. Alors pour
,
en particulier pour
,
donc
et finalement
. La seuls valeur propre possible de
est 0 et donc
ne peut pas être diagonalisable (Sinon
).
Soit
une matrice n'ayant qu'une seule valeur propre
et diagonalisable. Alors pour une certaine matrice
,
.
III.2.3 Une suite d'ordre 3
Soit
une suite de réels vérifiant
.
Pour
, on note
. Alors
Par une récurrence immédiate,
.
Calculons
en la diagonalisant si possible.
On a
. Ainsi
est diagonalisable et
est une matrice diagonale associée via une matrice de passage
(
que l'on a pas besoin de calculer pour la suite
).
On a alors
. Les coefficients de
sont des combinaisons linéaires de
.
Ainsi
avec
à déterminer grâce aux valeurs de
.
III.2.4 Théorème
Soit
une suite et
.
On suppose qu'il existe
tels que
.
Le polynôme
est appelé polynôme caractéristique de
.
Si
est scindé à racines simples, notées
alors il existe des scalaires
tels que
.
Preuve
Reprenons la trame de l'exemple précédent.
La matrice est maintenant
.
Cette matrice est appelée matrice compagnon de l'équation définissant la suite.
Soit
.
On peut donc procéder par récurrence, si
(remarquer le changement d'indice pour
, le premier des coefficients dans la matrice est
) alors
en changeant d'indice et en incorporant
à la somme.
Si
est scindé à racines simples, alors
est diagonalisable et on peut conclure comme dans l'exemple précédent.
III.2.5 Espaces propres des matrices compagnons
Dans le cas général, montrer que les espaces propres de
sont des droites et donc que
est diagonalisable ssi
est scindé à racines simples.
On trouve :
pour une valeur propre
d'une matrice compagnon,
.
IV Trigonalisation
IV.1 Théorie
IV.1.1 Théorème
Soit
.
est scindé sur
ssi il existe une base
telle que
est triangulaire supérieure (on dit que
est trigonalisable).
La diagonale est constituée de toutes les racines de
, avec multiplicité (une racine de multiplicité
apparaît
fois sur cette diagonale).
Preuve
Hors programme. Remarquons d'abord que s'il existe une base
dans laquelle la matrice de
est triangulaire supérieure, alors
est scindé et ses racines sont les coefficients diagonaux.
Traitons d'abord le cas
(le cas
est trivial : tous les polynômes caractéristiques sont scindé et toutes les matrices diagonales donc triangulaires) Supposons
scindé sur
et notons
une racine (éventuellement double). Alors on peut poser
un vecteur propre associé à
et compléter
(qui est libre car
) en une base
. En observant la première colonne,
est triangulaire supérieure et alors les racines de
sont bien les coefficients diagonaux (d'après le raisonnement précédent).
Soit
fixé, supposons que lorsque
, tout endomorphisme dont le polynôme est scindé sur
est trigonalisable. Supposons que
et prenons
tel que
est scindé sur
. Comme dans le cas
, on considère une valeur propre
et un vecteur propre associé
que l'on complète en une base
de
(
rien ne dit que les autres vecteurs sont des vecteurs propres
). Alors, en notation par bloc
où
est une ligne de taille
(
qui ne nous intéresse pas
) et
. Posons
l'endomorphisme de
canoniquement associé à
. On a
par déterminant triangulaire par bloc. Ainsi,
est scindé sur
(ses racines sont les mêmes que celle de
, en enlevant une occurrence de
) et donc, par hypothèse de récurrence,
est trigonalisable et on peut poser
telles que
est triangulaire supérieure et
.
Maintenant, considérons
. Alors
est inversible (son déterminant est le même que celui de
) et
en évaluant le produit matriciel colonne par colonne. Ainsi
est bien trigonalisable (dans la base
telle que
).
Finalement, par récurrence, quelque soit la dimension de
, dès que
est scindé sur
il existe une base dans laquelle la matrice de
est trigonalisable.
IV.1.2 Corollaire
Soit
.
est semblable à une matrice triangulaire supérieure réelle ssi
est scindé sur
.
Soit
. Alors
est trigonalisable dans
ie il existe
telle que
est triangulaire supérieure.
Preuve
Tout polynôme non nul de
est scindé !
IV.1.3 Exemple
On reprend la matrice du
II.2.2
.
n'est pas diagonalisable car
.
On note
. Alors
.
Trouver
tel que
. Le système à résoudre est
On prend
. Dans la base
la matrice de l'endomorphisme canoniquement associé à
est
qui est bien triangulaire.
IV.2 Conséquences pratiques
IV.2.1 Proposition
Soit
et
les racines (complexes) de
non nécessairement distinctes.
Le même résultat vaut pour les matrices.
Preuve
Notons
l'une des matrices de
.
On peut alors trigonaliser
en posant
et
avec
triangulaire et telles que
.
On a alors
. De même pour le déterminant.
IV.2.2 Remarque
On retrouve le fait que
est bijective (ou
est inversible) ssi
n'est pas valeur propre de
.
IV.3 Deviner la dernière valeur propre
Remarquons que
est valeur propre au moins double de
car
et donc
.
Comme
, la dernière valeur propre complexe
vérifie
et donc
. On a calculé la trace d'une matrice triangulaire semblable à
.