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Chapitre 5 : Compléments sur les espaces vectoriels


Dans ce chapitre K désigne R ou C .

I Espaces vectoriels

I.1 Sous-espaces et dimension

I.1.1 Définition

Soit E un K -espace vectoriel.
  1. On dit que E est de dimension finie ssi E possède une famille génératrice finie E=Vect(u1,,up) c'est à dire que chaque élément de xE peut s'écrire sous la forme x=k=1pλkuk où les λkK sont des scalaires.
  2. Dans le cas où E est de dimension finie, E possède au moins une base et toutes les bases de E ont le même cardinal que l'on appelle la dimension de E et que l'on note dimK(E) ou plus simplement dim(E) s'il n'y a pas d'ambiguïté sur K
I.1.2 Dimensions usuelles
  1. dimK(K)=1 , une base est (1)
  2. dimR(C)=2 et la base canonique est (1,i) .
  3. dimK(Kn)=n .
  4. dimK(Kn[X])=n+1
  5. dimR(Cn)=2n
  6. dimK(Mn,p(K))=n×p
I.1.3 Remarque
Plus généralement, si E est un C -espace vectoriel de dimension n , alors on peut considérer E comme un R -espace vectoriel et dimR(E)=2n .
I.1.4 Proposition (Formules de dimension)
On considère E,F deux K -espaces vectoriels de dimensions finies. Soit également m,nN{0}
  1. dim(E×F)=dim(E)+dim(F)
  2. dim(L(E,F))=dim(E)×dim(F)
  3. dim(L(E))=(dim(E))2
  4. Si E,F sont deux sous-espaces d'un même espace vectoriel, dim(E+F)=dim(E)+dim(F)dim(EF)
I.1.5 Rappel
Dans un espace de dimension fini, dim(E)=n , on a pour une famille F=(u1,,up)
  1. Si F est libre alors pn .
  2. Si F est génératrice alors pn .
I.1.6 Théorème
Soit E un K -espace vectoriel de dimension n et F un sous-espace de E .
  1. F est de dimension fini et dim(F)n
  2. F=E ssi dim(F)=n
Preuve
Une idée de la preuve (voir le cours de sup pour plus de détails) :
On considère une famille libre de cardinal maximal dans F (le cardinal des familles libres est forcément n d'après le point précédent) et on montre que cette famille est forcément génératrice de F .
I.1.7 Exemple
On se sert très souvent de la deuxième partie de cette propriété pour prouver l'égalité de deux espaces.
Considérons par exemple le plan P:x+y+z=0 dans R3 . On vérifie aisément que u=(1,1,0) et v=(1,0,1) sont des éléments de P et donc Vect(u,v)P . De plus, Vect(u,v) est de dimension 2, tout comme P car (u,v) est libre. Donc P=Vect(u,v) (et on a en fait trouvé une base de P ).

I.2 Supplémentaires

I.2.1 Définition

Soient E un K -espace vectoriel et F,G deux sous-espaces. La somme de F et G est F+G={xF+xG| xFF et xGG} . C'est un espace vectoriel et on a même F+G=Vect(FG) .
I.2.2 Exemple
Dans R2 , la somme de deux droites vectorielles non confondues est R2 : on raisonne sur la dimension de l'espace vectoriel somme qui vaut forcément 2 (par élimination des deux autres cas).
Dans R3 la somme d'un plan et d'une droite non contenue dans ce plan est R3 .
I.2.3 Famille génératrice
Si on dispose d'une famille (ui) génératrice de F et d'une famille (vi) génératrice de G , alors la concaténation de ces familles engendre F+G .
Ainsi, en dimension finie, dim(F+G)dim(F)+dim(G), dim(F+G)dim(F), dim(F,+G)dim(G)
I.2.4 Exemple
On se place dans R3 .
Donner une base de P1+P2P1:xy+2z=0 et P2=Vect((110),(121)) .
On a P1=Vect((110),(201)) ( en résolvant le système à 3 inconnue et une seule équation, on a posé y,z comme paramètres ).
Alors P1+P2=Vect((110),(201),(110),(121)) ( cette famille génératrice ne peut pas être libre car elle est de cardinal 4 dans un espace de dimension maximale 3 ). on remarque la présence de deux fois le même vecteur. Alors P1+P2=Vect((201),(110),(121)) il reste à prouver que cette dernière famille est libre. Considérons sa matrice dans la base canonique, M=(211012101) . Par l'opération L1L1+2L3 puis développement par rapport à la première ligne, det(M)=+1×|1112|=1 et donc MGL3(R) . Ainsi la famille de ses colonnes forme une base de R3 donc est libre et est une base de P1+P2 .
Deuxième méthode :P1P1+P2R3 donc 2dim(P1+P2)3 . De plus, dim(P1+P2)=2 ssi P1+P2=P1 d'après I.1.6 ; Or (121)P1 ( il ne vérifie pas l'équation ) et donc P1+P2P1 et la seule possibilité restante est dim(P1+P2)=3 et donc P1+P2=R3 .
Finalement une base de P1+P2 est la base canonique de R3 .
I.2.5 Définition

Soient E un K -espace vectoriel et F,G deux sous-espaces. On dit que F et G sont supplémentaires dans E et on note E=FG ssi xE ! (xF,xG)F×G x=xF+xG Avec ces notations, xF est appelé le projeté de x sur F dans la direction G (ou parallèlement à G ) et xG le projeté de x sur G dans la direction F .
I.2.6 Caractérisation
On montre facilement (en sup) que E=FG{E=F+GFG={0E} .
I.2.7 Exemple
  1. Mn(K)=Sn(K)An(K) et la décomposition associée est A=12(A+tA)+12(AtA) .
    La preuve se fait par analyse-synthèse.
  2. Notons F={f:RR| f est paire} et G={f:RR| f est impaire} .
    Alors RR=FG , les éléments correspondants à fE dans F et G étant respectivement xf(x)+f(x)2 et xf(x)f(x)2 .
I.2.8 Théorème (Théorème de la base adaptée)

Soit E un espace de dimension fini et F,G des sous-espaces de E .
E=FG ssi la concaténation d'une base de F et d'une base de G est une base de E . On dit que la base obtenue (par concaténation) est adaptée à la somme FG .
On a alors évidemment dim(E)=dim(F)+dim(G)
Preuve
Soient (f1,,fp) une base de F et (g1,,gr) une base de G .
  • On suppose dans un premier temps que E=FG .
    Montrons que B=(f1,,fp,g1,,gr) est une base de E .
  • Caractère générateur. Soit xE . Alors on peut poser (xF,xG)F×G tels que x=xF+xG . Comme (f1,,fp) engendre F , xF est une combinaison linéaire de (f1,,fp) . De même, xG est une combinaison linéaire de (g1,,gr) et par somme x est bien une combinaison linéaire des éléments de B . On a donc bien E=Vect(f1,,fp,g1,,gr) .
    Caractère libre. Soient α1,,αp,β1,,βrK . Supposons que k=1pαkfk+k=1rβrgr=0E. Alors k=1pαkfkF=k=1rβrgrG et comme FG={0E} chacune des deux sommes est nulles. Par liberté des familles (f1,,fp) et (g1,,gr) on a bien tous les αk et tous les βk nuls.
    Finalement, B est bien une base.
  • Supposons réciproquement que B=(f1,,fp,g1,,gr) est une base de E . Montrons que E=FG .
    Soit xE . Par définition d'une base on peut poser α1,,αp,β1,,βrK tels que x=k=1pαkfk+k=1rβrgr ( ces scalaires sont les coordonnées de x dans B ).
    On a immédiatement sous cette forme xF+G et donc E=F+G (car l'inclusion F+GE est triviale.)
  • Les coordonnées dans une base étant unique, on a également unicité de xF=k=1pαkfkF et xG=k=1rβrgrG tels que x=xF+xG (tout écriture sous forme d'un élément de F + un élément de G doit correspondre : les coordonnées de xF sont les αk et celles de xG les βk , dans les bases correspondantes de F et G )
I.2.9 Corollaire
En dimension finie, tout sous-espace possède au moins un supplémentaire.
Preuve
Il s'agit d'appliquer le théorème de la base incomplète à une base de F (pour la famille libre) et une base de E (pour la famille génératrice).
I.2.10 Théorème (Grassmann)
Soient F,G deux sous-espaces de dimension finies d'un espace vectoriel E . Alors dim(F+G)=dim(F)+dim(G)dim(FG)
Preuve
Une idée de la preuve : considérer H un supplémentaire de FG dans G (possible d'après le corollaire précédent) et montrer que FH=F+G .
I.2.11 Corollaire
Dans un espace de dimension finie, on a E=FG{F+G=Edim(F)+dim(G)=dim(E){FG={0E}dim(F)+dim(G)=dim(E)
Preuve
Utiliser la formule de Grassman : dim(F+G)=dim(F)+dim(G) ssi dim(FG)=0FG={0E} .
I.2.12 Exercice
Caractériser (donner une ou des CNS sur) les espaces supplémentaires dans R2 et R3 .

I.3 Hyperplans

I.3.1 Définition

Soit E un espace vectoriel de dimension finie ou infinie. Un sous-espace H de E est appelé hyperplan ssi H admet une droite comme supplémentaire.
I.3.2 Proposition

Les hyperplan de E de dimension n>0 sont exactement les sous-espaces de dimension n1 .
I.3.3 Exemple
Les droites du plan, les plans dans l'espace. Remarquer les équations cartésiennes similaires dans ces cas.
I.3.4 Hyperplans et équations
Si on considère un système à 1 équation et n inconnues (équation non triviale) alors l'ensemble des solutions est un hyperplan.
Par exemple, F={PRn1[X];P(2)=0} est un hyperplan de Rn1[X] (les n inconnues sont ici les coefficients de d'un polynôme P ).

I.4 Sommes directes d'espaces vectoriels

I.4.1 Définition-proposition

Soit E un K -espace vectoriel et F1Fp des sous espaces de E .
  1. La somme des espaces (Fi)i1,p est i=1pFi={u1++up| u1F1 et u2F2 et  et upFp} .
    C'est le sous espace de E engendré par les Fi
  2. On dit que la somme F=i=1pFi est une somme directe et on note F=i=1pFi ssi tout vecteur uF s'écrit de manière unique sous la forme u=u1++up avec i1,puiFi .
La somme et la somme directe sont associatives, ce qui permet de justifier a posteriori l'utilisation de et
Preuve
  1. Il s'agit de montrer que i=1nFi est un sous-espace de E et que la somme d'espace est associative. Nous allons le montrer dans le cas p=3 et on pourrait généraliser facilement (seule la formalisation est plus délicate).
    Montrons que
    F1+F2+F3 cette définition =(F1+F2)+F3 somme de deux espaces =F1+(F2+F3) somme de deux espaces 
    Soit xF1+F2+F3 . Alors on peut écrire x=u1+u2+u3uiFi pour i1,3 .
    Alors x=(u1+u2)+u3(F1+F2)+F3 et x=u1+(u2+u3)F1+(F2+F3) et on a prouvé deux inclusions.
    Soit maintenant x(F1+F2)+F3 . Alors on peut écrire x=u+u3uF1+F2 et u3F3 par définition de la somme de deux espaces. Comme uF1+F2 , on peut écrire u=u1+u2u1F1 et u2F2 . Finalement on a bien xF1+F2+F3 .
    De la même manière F1+(F2+F3)F1+F2+F3 et on a bien
    F1+F2+F3=(F1+F2)+F3=F1+(F2+F3)
    ce qui prouve au passage que F1+F2+F3 est un sous-espace de E en tant que somme de deux sous-espaces.
    On a alors F1+F2+F3=Vect((F1F2)F3)=Vect(F1F2F3) .
  2. Comme la somme d'espaces est associative, la somme directe l'est aussi.
I.4.2 Remarque
Le cas p=2 est déjà connu. La somme F+G est directe ssi F et G sont supplémentaires dans F+G . Autrement dit F+G=FGFG={0E}
I.4.3 Exercice
Trouver 3 espaces D1,D2,D3 tels que R3=D1D2D3 .
I.4.4 Théorème

Soient F1,,Fp des sous espaces de E . La somme i=1pFi est directe ssi (u1,,un)i=1pFi u1++up=0Eu1=u2==up=0E.
Ainsi il suffit de vérifier que le vecteur nul possède une unique écriture sous forme de somme.
Preuve
Si on suppose la somme directe, alors le vecteur nul s'écrit de manière unique comme 0E=0EF1++0EFp .
Réciproquement, supposons que (u1,,un)i=1pFi u1++up=0Eu1=u2==up=0E . Soit ui=1pFi . Montrons que sa décomposition en somme est unique.
Si on a u=i=1pui=i=1pui avec i1,pui,uiFi alors i=1p(uiui)Fi=uu=0E et donc uiui=0E pour tout i1,p par hypothèse.
I.4.5 Exemple
Montrer que si B=(ei)i1,n est une base de E alors E=i=1nVect(ei) .
On a déjà i=1nVect(ei)=Vect(e1,,en)=E car B est génératrice de E .
De plus, si on pose des uiFi=Vect(ei) pour i1,n tels que i=1nui=0E alors on peut écrire ui=αiei car uiVect(ei) pour tout i .
On a donc i=1nαiei=0E et comme B est libre i1,n αi=0K et donc ui=0E ce qui conclut.
I.4.6 Définition-proposition (Théorème de la base adaptée)

Soient F1,,Fp des sous espaces de E , de dimensions finies. Notons F=i=1pFi .
F=i=1pFi ssi la concaténation de bases des Fi est une base de F .
Une telle base de F est dite adaptée à la somme directe.
Preuve
Procéder par récurrence sur le nombre d'espace, le cas p=2 étant le théorème de la base adaptée pour les espaces supplémentaires.
I.4.7 Remarque
  1. Observer le ssi, et surtout la réciproque. Il est facile de décomposer un espace en somme si on en connaît une base. Par exemple R3[X]=Vect(1)Vect(X,X2)Vect(X3) .
  2. On obtient immédiatement dim(i=1pFi)=i=1pdim(Fi) .
I.4.8 Pour les 5/2
Quels genre de sous-espaces sont forcément en somme directe ?
Réponse : des espaces propres associés à des valeurs propres distinctes.

II Applications linéaires

II.1 Propriétés générales

II.1.1 Définition

Soient E,F deux K -espaces vectoriels et f:EF . On dit que f est linéaire ssi α,βKx,yE f(αx+βy)=αf(x)+βf(y) On a alors f(0E)=0F .
Si F=K on dit que f est une forme linéaire . L'ensemble des applications linéaires de E dans F est noté L(E,F) .
II.1.2 Exemple
Quelques exemples important (avec des notations évidentes) : ff,fabf,(un)n(un+1)n,PP(X+1),PP(a) (avec un aK fixé).
D'autres plus géométriques : les projection (orthogonales ou non) et symétries, les rotations du plan et de l'espace.
II.1.3 Application canoniquement associée
Soit AMn,p(K) . L'application linéaire canoniquement associée à A est f:{KpKnXAX et la matrice dans les bases canoniques de Kp et Kn de f est la matrice A .
II.1.4 Proposition
  1. L(E,F) est un K -espace vectoriel (de dimension dim(E)×dim(F) quand E,F sont de dimensions finies).
  2. Quand elle existe, la composée de deux applications linéaire est linéaire.
  3. Quand elle existe, la bijection réciproque d'une application linéaire est linéaire.
II.1.5 Définition

Soit fL(E,F) .
  1. Son noyau est ker(f)=f1({0})={xE| f(x)=0F} .
  2. Son image est Im(f)=f(E)={yF| xE y=f(x)} .
II.1.6 Exemple
Notons B=(1,X,X2) la base canonique de R2[X] et fL(R2[X]) telle que MatB(f)=(112211112) . Calculer ker(f) .
On trouve ker(f)=Vect(1XX2)il faut transformer la colonne (111) trouvée pour la matrice en un vecteur de R2[X] en se souvenant que les coefficients sont en fait les coefficients dans la base canonique de R2[X]
II.1.7 Proposition

Soient fL(E,F) , G un sous-espace de E et H un sous-espace de F .
Alors f(G) et f1(H) sont des sous-espaces de F et E respectivement. En particulier ker(f) est un sous-espace de E et Im(f) est un sous-espace de F .
Preuve
  • Montrons que f(G) est un sous espace de F .
    Soient donc x,yf(G), λ,μK . Montrons que λx+μyf(G) .
    Or x,yf(G) donc on peut poser u,vG tels que x=f(u) et y=f(v) . Alors, par linéarité, λx+μy=f(λu+μG)f(G) car λu+μvG (c'est un espace vectoriel).
  • Montrons que f1(H) est un sous-espace de E .
    Soient x,yf1(H) et λ,μK .
    Alors f(λx+μy)=λf(x)H+μf(y)HH car H est un sous-espace de F donc λx+μyf1(H)
II.1.8 Rappels
Soit fL(E,F) .
  1. f est injective ssi ker(f)={0E} .
  2. f est surjective ssi Im(f)=F (valable même si f n'est pas linéaire).
  3. Si E=Vect(e1,,en) alors Im(f)=Vect(f(e1),,f(en)) .
  4. Si (e1,,en) est une base de E , f est bijective (isomorphisme) ssi (f(e1),f(en)) est une base de F .
    Pour une application linéaire fL(E,F) avec E de dimension finie, si f est bijective alors on a forcément dim(F)=dim(E) .
II.1.9 Équation linéaire
On dit d'une équation qu'elle est linéaire ssi elle est de la forme f(x)=bfL(E,F) est une application linéaire, bF est fixé et l'inconnue est x , un élément de E .
Par exemple :
  • xR y(x)+3y(x)+xy(x)=cos(x) d'inconnue yC2(R,R) est une équation linéaire et ici f:yy+3yId et b=cos . On prouve facilement que f est linéaire (par compositions, et combinaison linéaire).
  • le système de matrice AMn,p(K) et second membre BKn peut s'écrire AX=B où l'inconnue est XKp est également une équation linéaire. Cette fois l'application linéaire est l'application canoniquement associée à A .
Dans tous les cas si on dispose d'une solution particulière xp qui vérifie donc f(xp)=b on peut écrire f(x)=bf(x)=f(xp)f(xxp)=0xxpker(f)xxp+ker(f) et donc toute solution de f(x)=0 est de la forme xp+xHxp est une solution particulière et xH une solution de l'équation homogène associée.

II.2 Applications linéaires et dimension

II.2.1 Proposition (Théorème d'isomorphisme)

Soit fL(E,F)E et F sont deux K (espaces vectoriels.
Si H un supplémentaire de ker(f) dans E alors f|H:{HIm(f)xf(x) est un isomorphisme.
Preuve
On a f|H:{HImfxf(x) et Hker(f)=E . Il s'agit bien d'une application linéaire de L(H,Imf) .
  • kerf|H={xH| f(x)=0}=Hkerf={0E} car H et kerf sont en somme directe.
  • Soit yImf . Alors il existe xE tel que f(x)=y .
    Or on peut écrire x=xH+xK avec xHH et xKkerf . Ainsi f(x)=f(xH)+f(xK)=f(xH)+0E et donc y=f(xH)=f|H(xH) .
    Donc Imf|H=Imf .
Finalement f|H est bien un isomorphisme linéaire.
II.2.2 Théorème (Théorème du rang)

Soit fL(E,F) et supposons E de dimension finie . Alors dim(E)=dim(ker(f))+rg(f)
Preuve
Comme E est de dimension finie, on peut poser H un supplémentaire de ker(f) dans E . Alors dim(H)=dim(E)dim(ker(f)) et d'après le théorème précédent, dim(H)=dim(Im(f))=rg(f) ce qui conclut.
II.2.3 Exemple
Si E est de dimension n et fL(E,K) est une forme linéaire non nulle, alors dim(ker(f))=n1 .
II.2.4 Corollaire
Soit E,F des espaces de même dimension et fL(E,F) . f est bijective f est injectivef est surjective Dans le cas où f est un endomorphisme, les dimensions de E et F sont évidemment égales et ce résultat s'applique.
II.2.5 Exemple (Polynômes interpolateur de Lagrange)
Soient a0,anK des scalaires deux à deux distincts.
L'application ϕ:{Kn[X]Kn+1P(P(a0)P(an)) est injective (compter les racines d'un polynôme du noyau, seul le polynôme nul en possède autant) et donc bijective.
En conséquence, si on fixe y0,,ynK (quelconques cette fois), il existe un unique polynôme PKn[X] tel que i0,n P(ai)=yi , ou encore par n+1 points d'abscisses 2 à 2 distinctes il passe une unique courbe polynomiale de degré n ou moins.
Pour déterminer P , on calcule les Pi tels que ϕ(Pi)=ei le i ème vecteur de la base canonique de Kn+1 . Un raisonnement rapide sur les racines (2 à 2 distinctes) de Pi montre que Pi=αij=0in(Xaj) et comme Pi(ai)=1 on trouve la valeur de αi .
Ensuite, la linéarité de ϕ montre que ϕ(i=0nyiPi)=i=0nyiei et donc P=i=0nyiPi .
II.2.6 Corollaire
Soit fL(E)E est de dimension finie. fGL(E)gL(E) fg=IdEgL(E) gf=IdE
II.2.7 Exemple
Soit f un endomorphisme d'un espace de dimension finie, vérifiant f23fId=0 . Montrer que f est un automorphisme et exprimer f1 .
On a f(f3Id) et donc f est bijective et f1=f3Id .
II.2.8 Remarque
C'est le pendant du théorème qui énonce qu'une matrice est inversible ssi on trouve un inverse à gauche ou un inverse à droite.

II.3 Espaces stables

II.3.1 Définition

Soit fL(E) et F un sous-espace de E . On dit que F est stable par f ssi f(F)F .
II.3.2 Exemple
Soit fL(E) et λK . Montrer que Fλ=ker(fλidE) est stable par f .
Soit xFλ . Alors (fλId)(x)=0E et donc f(x)λx=0E ou encore f(x)=λx . Or Fλ est un sous-espace de E (car c'est un noyau d'endomorphisme) et donc λxFλ .
Ainsi f(x)Fλ et Fλ est effectivement stable par f .
II.3.3 Endomorphisme induit
Si F est stable par f alors on peut définir f|F:{FFxf(x) la restriction de f à F (le détail important ici est l'espace d'arrivé qui est illégal si F n'est pas stable).
Alors f|FL(F) .
II.3.4 Familles génératrices
Soit F=Vect(e1,,ep) . F est stable par f ssi j1,pf(ej)F . En effet f(F)=Vect(f(e1),,f(ep)) .
II.3.5 Exemple
Considérons l'application f:(xyz)(x+y+zxy+zx+yz) .
On pose u=(201),v=(021),w=(101) , F=Vect(u,v) et G=Vect(w) .
Montrer que B=(u,v,w) est une base de R3 , que F,G sont stables par f , calculer Mat(u,v)(fF),Mat(v)(fG) et MatB(f) .
Réponse : Le déterminant dans la base canonique de (u,v,w) vaut -6 (faire l'opération C3C312C1 pour trouver un déterminant triangulaire.) et donc B est bien une base de R3 .
On a f(w)=(202)=2wG et donc G est stable par f . De plus, f(u)=(131)=12u+32v ( on a cherché α,βR tels que f(u)=αu+βv ) et f(v)=(311)=32u12v et donc F est stable par f .
Ces calculs permettent d'écrire les matrices demandées Mat(u,v)(f|F)=(12323212), Mat(w)f|G=(2) et MatB(f)=(1232032120002) où les 0 sont la conséquence du fait que G est stable par f (seul w est nécessaire à l'expression de f(w) ) et les 0 la conséquence de la stabilité de F par f ( f(u),f(v) s'expriment en fonction de seulement u et v ).
II.3.6 Théorème

Soit F un sous-espace de E , BF une base de F que l'on complète en une base B de E . On note n=dim(E) et p=dim(F)F est stable par f ssi MatB(f) est de la forme (AB0C)
  • AMp(K) ( et on a alors A=MatBF(f|F) )
  • BMp,np(K)
  • CMnp(K)
  • 0 représente la matrice nulle de Mnp,p
Preuve
On note M=(mi,j)=MatB(f)Mn(K) .
Supposons F stable par f et notons, B=(e1,,ep,ep+1,,en) (les p premiers sont dans F ). Pour j1,p , on a f(ej)=i=1nmijei . Les derniers termes de cette somme sont nuls car ejF , ainsi f(ej)=i=1pmijei . Ceci prouve que les n - p dernières lignes de M sont nulles dans les p premières colonnes.
Réciproquement, si M est de la forme annoncée, alors f(ej) n'a des coordonnées que sur e1,,ep ie est dans F , et ce pour tout j1,p .

III Endomorphismes particuliers

III.1 Homothéties

III.1.1 Définition

Soit E un K -espace vectoriel. Soit λK . L'homothétie de rapport λ est l'application linéaire {EExλx .
III.1.2 Exemple
Deux homothéties très importantes : l'application nulle et l'identité.
III.1.3 Matrice d'une homothétie
On considère E de dimension finie égale à n cette fois et on note hλ l'homothétie de rapport λ . Alors dans toute base B de E , MatB(hλ)=λIn .
Matriciellement, la seule matrice semblable à λIn est elle même, car pour PGLn(K) , on a P1λInP=P1PλIn=λIn .
III.1.4 Commutation
Une homothétie commute avec tout endomorphisme.

III.2 Projecteurs, symétries

III.2.1 Définition

Soit E un K -espace vectoriel. Soient également F,G deux sous-espaces de E , supplémentaires dans E . Tout xE s'écrit donc de manière unique comme xF+xG avec xFF et xGG . L'application p:{EExxF est appelé projecteur sur F parallèlement à G (ou de direction G ). L'application s:{EExxFxG est appelé symétrie par rapport à F parallèlement à G (ou de direction G ).
III.2.2 Illustration
On représente les deux projections d'un vecteur u de R2 sur les droites F et Gsupplémentaires dans R2 , avec les mêmes conventions de notation que la définition.
Pour obtenir les projections, on a tracé en pointillés les parallèles à F et G passant par l'extrémité de u . les projections sont obtenues par intersection de ces parallèles avec G et F respectivement.
Remarquons qu'on a bien u=uF+uG ou encore uG=uuF
III.2.3 Liens entre ces applications
  1. On a les liens important entre ces applications : s=2pId et p=s+Id2 .
  2. Si p et s désignent les projection et symétrie sur G et de direction F , on a p+p=Id,pp=0=pp,s+s=0,ss=ss=Id ..
III.2.4 Méthode
Pour déterminer la projection p(x) d'un vecteur x sur F parallèlement à G on exprime deux conditions sur p(x) :
  1. p(x)F
  2. xp(x)G
III.2.5 Exemple

Soient u=(11) et v=(21)R2 . Alors (u,v) est une base de R2 ( deux vecteurs libres dans un espace de dimension 2 ).
Ainsi F=Vect(u) et G=Vect(v) sont supplémentaires dans R2 d'après le théorème de la base adaptée. Notons p la projection sur F dans la direction G et déterminons p(X)X=(xy) .
  • On a p(X)F et donc p(X)=αu pour un αR .
  • On a Xp(X)G et donc Xp(X)=βv pour un βR .
Ainsi (xy=)X=αu+βv=(α2βα+β) et donc α=x+2y .
Finalement, p(X)=αu=(x2y)(11)=(x2yx+2y)=(1212)(xy) .
On constate que pL(R2) et est canoniquement associée à la matrice (1212) .
III.2.6 Théorème

Soit E un K -espace vectoriel. Soient également F,G deux sous-espaces de E , supplémentaires dans E
  1. Soit p le projecteur sur F de direction G . On a alors :
    • pL(E)
    • p2=p
    • kerp=G
    • Imp=F=ker(IdEp)

  2. Réciproquement si fL(E) vérifie f2=f alors f est le projecteur sur Im(f)=ker(fId) dans la direction ker(f) (et on a donc ker(f)Im(f)=E ).
Preuve
  1. Prouvons tout d'abord la linéarité.
    Soient x,yE que l'on décompose en x=xF+xG et y=yF+yG .
    Soient α,βK .
    Alors p(αx+βy)=p((αxF+βyF)+(αxG+βyG))=αxF+βyF=αp(x)+βp(y) et p est bien linéaire.
    Evidemment, p2(x)=p(xF+0E)=xF=p(x) et on a bien p2=p .
    Ensuite, avec les mêmes notations, p(x)=0E ssi xF=0E ssi xG . De plus, p(x)=xFF et on a en fait prouvé Im(f)F .
    Si xF , alors p(x)=xIm(f) et donc FIm(p) et finalement F=Im(p) .
    Il reste à prouver que Im(p)=ker(pIdE) . ON a déjà montré que tout xF vérifie p(x)x=0 ie (pIdE)(x)=0 et donc Fker(pIdE) .
    Soit maintenant xker(pIdE) ie x vérifie p(x)=x . Ainsi xIm(p) et l'autre inclusion est prouvée.

    • On a d'abord (fId)f=0 donc Im(f)ker(fId) . L'autre inclusion est évidente (cf fin du point précédent).
    • Montrons maintenant que ker(f)ker(fId)=E . Soit xE .
      • Analyse : Supposons que x=x1+x2 avec x1ker(f) et x2ker(fId) .
        Alors f(x)=0E+f(x2)=x2 . Ainsi x2=f(x) et donc x1=xx2=xf(x) .
      • Synthèse : Réciproquement, posons x1=xf(x) et x2=f(x) .
        Montrons que x=x1+x2 (trivial) et que x1ker(f) et x2ker(fId) (moins trivial).
        Cependant, f(x1)=f(x)f2(x)=0E et (fId)(x2)=f(x2)x2=f2(x)f(x)=0E car f2=f .

      Conclusion : E=ker(f)+ker(fId) . Le fait que la somme est directe provient directement de l'analyse (les seules valeurs possibles sont...) ou du fait que si xker(f)ker(fId) alors f(x)=0E et f(x)x=0E donc x=0E et on a bien ker(f)ker(fId)={0E} .
    • Par définition d'un projecteur, et d'après notre analyse, f est le projecteur sur ker(fId)=Im(f) dans la direction ker(f) .
III.2.7 Exemple
Soit la matrice A=16(521222125) Montrer que l'endomorphisme canoniquement associé à A est un projecteur dont on précisera les éléments caractéristiques.
Question 5/2 : au vu de la matrice A , que dire de plus de la projection ?
Réponse :
Notons p l'application linéaire canoniquement associée à A . on a A2=A (par produit matriciel direct) et donc pp=p ; Ainsi p est bien un projecteur.
Il s'agit du projecteur sur F=ker(pIdR3)=ker(AI3) , dans la direction G=ker(p)=ker(A) . Calculons ces espaces. Soit X=(xyz)R3 . On prendra garde au facteur 16 au moment de calculer AI3=16(6A6I3) .
  • Xker(AI3)(AI3)X=0{x2y+z=02x4y+2z=0x+2yz=0 .
    Les 3 équations sont proportionnelles et donc F=Vect((210),(101)) est le plan d'équation F:x+2yz=0 .
  • Xker(A)AX=0{5x2y+z=02x+2y+2z=0x+2y+5z=0 . on résout ce système ( diviser la deuxième ligne par 2 puis l'utiliser pour éliminer x des deux autres équations ) et on trouve que G=Vect(121) est la droite dirigée par (121)
Finalement, p est le projecteur sur le plan F:x+2yz=0 et parallèlement à la droite dirigée par (121) .
Réponse 5/2 :A étant symétrique réelle, ses espaces propres F=E1(A) et G=E0(A) sont orthogonaux et donc p est un projecteur orthogonal.
III.2.8 Matrice dans une base adaptée
  1. On considère p le projecteur de R3 sur un plan P parallèlement à une droite D non inclue dans P . On note B=(u,v,w) une base adaptée à R3=PD . Donner la matrice de p dans B .
  2. Même question dans le cas général E=FG . On note B=(e1,,en) une base adaptée avec F=Vect(e1,,er) et G=Vect(er+1,,en) (et on suppose que r=dim(F)1,n1 : si r=0 alors p=0L(E) et si r=n alors p=IdE .)
    On trouve, en notation par bloc
    MatB(p)=(Ir000)
    car pour eiF on a p(ei)=ei et pour eiG on a p(ei)=0E .
III.2.9 Remarque
Pour un projecteur p en dimension finie, on a toujours Tr(p)=rg(p)=dim(ker(pId))
III.2.10 Exemple
On considère l'application f:{Mn(K)Mn(K)AA+tA2 . Il s'agit, d'après le point I.2.7 de la projection sur Sn(K) parallèlement à An(K) .
III.2.11 Théorème

Soit E un K -espace vectoriel. Soient également F,G deux sous-espaces de E , supplémentaires dans E
  1. Soit s la symétrie par rapport à F dans la direction G . Alors :
    • sGL(E) et s2=IdE ie. s=s1
    • F=ker(sIdE)={xE| s(x)=x}
    • G=ker(s+Id)={xE| s(x)=x}

  2. Réciproquement, soit fL(E) . Si f2=IdE alors f est la symétrie par rapport à ker(fIdE) parallèlement à ker(f+IdE) qui sont donc supplémentaires dans E .
III.2.12 Exemple
Dans E=RR l'application s qui à une fonction f associe s(f):xf(x) est une symétrie. C'est la symétrie par rapport aux fonctions paire parallèlement aux fonctions impaires.
III.2.13 Matrice dans une base adaptée
Donner, avec les notations du théorème, la matrice de s dans une base adaptée à E=FG .
En utilisant les même notation que le point correspondant sur les projecteurs MatB(s)=(Ir00Inr)
III.2.14 Exemple
Remarquons que la transposition est une symétrie. C'est même la symétrie associée au projecteur de l'exemple III.2.10

III.3 Projection et espaces en somme directe

III.3.1 Définition

Soient F1,Fp des sous-espaces de E vérifiant E=i=1pFi . Pour xE , on pose x=x1++xp l'unique décomposition en somme telle que i1,pxiFi .
Le projeté du vecteur x sur Fj parallèlement à i=1ijpFi est le vecteur xj . Le projecteur associé est pj:xxj .
III.3.2 Remarque
Si la somme directe des Fi n'est pas égale à l'espace E global, on peut se ramener à la définition en considérant plutôt F=i=1pFi comme espace dans lequel on projette.
III.3.3 Proposition

Avec les notations de la définition précédente
  1. (k,l)1,p2 klpkpl=0
  2. j=1ppj=IdE .
III.3.4 En pratique
Pour déterminer ces projections, on procède comme dans le cas d'espaces supplémentaires :
  1. calcul de coordonnées dans une base adaptée si possible, et on regroupe par espace.
  2. analyse/synthèse s'il le faut.