Le cadre d'étude change : on considère toujours des fonctions continues, plus seulement sur des segments mais des intervalles quelconques.
I.1 Intégrales impropres
I.1.1 Définition
Soient
et
une fonction
continue
.
Si
existe et est finie on la note
et on dit que cette intégrale est une intégrale (impropre)
convergente
. Dans le cas contraire, l'intégrale est dite divergente.
I.1.2 Remarque
On ne se préoccupe pas de la valeur de
(la borne inférieure) du moment que l'intervalle de continuité est
fermé
en cette borne.
Par exemple pour
continue sur
,
est convergente ssi
est convergente.
I.1.3 Exemple
Convergence + calcul de la valeur de l'intégrale
.
I.1.4 Définition
Soient
et
.
La borne ouverte est
. Si
existe et est finie on la note
et on dit que cette intégrale est une intégrale (imprope)
convergente
.
I.1.5 Exemple (A savoir refaire)
Montrons que
converge et donnons sa valeur.
(ie. on fait une étude de convergence en 0).
Soit
.
Conclusion :
est une intégrale convergente et sa valeur est -1.
I.1.6 Définition-proposition
Soient
avec
(on peut avoir
).
Soit
.
S'il existe un
tel que
et
sont des intégrales convergentes alors on dit que
converge.
Dans ce cas on a
et on note cette valeur
.
Preuve
On a, par limite d'une somme (une intégrale convergente et une constante),
.
De même
. Finalement, l'égalité demandée est vérifiée.
I.1.7 Interprétation graphique
On peut continuer à voir une intégrale impropre comme une aire, mais cette fois comme l'aire limite d'un partie non nécessairement bornée.
I.1.8 Exemple
Montrer la convergence et calculer la valeur de
.
I.1.9 Coin-culture
L'intégrale suivante est d'importance fondamentale en probabilité :
.
I.1.10 Définition (Notation)
Soit
un intervalle dont les bornes sont
. Ces bornes peuvent être ouvertes ou fermées. On note
l'intégrale (classique ou impropre)
.
Cette notation permet de ne pas préciser à priori la nature fermée ou ouverte des bornes.
I.2 Prolongement par continuité
I.2.1 Proposition
On se place dans le cas
et
(ce n'est pas
).
Si on peut prolonger
par continuité en
(on note
le prolongement), alors l'intégrale
converge et sa valeur est
(qui est une intégrale sur un segment).
Le résultat s'applique encore lorsque c'est la borne inférieure qui est ouverte, voire lorsque les deux bornes sont ouvertes, si on peut prolonger à chaque borne.
Preuve
Soit
la primitive de
sur
qui s'annule en
et
la primitive de
sur
qui s'annule en
, alors
et
est continue sur
.
est donc le prolongement par continuité de
et on a bien
.
I.2.2 Exemple
Montrer que
converge.
Posons
qui est continue sur
(et donc on a deux études de convergence à faire.)
Etude en 0. On a
et
donc
et on peut prolonger
par continuité en 0.
Etude en 1. On a
car
. Ainsi
et on peut prolonger
par continuité en 1.
Finalement,
converge.
I.3 Intégrales de référence
Dans cette partie, nous allons lister des intégrales notoirement convergentes. Les résultat ainsi que les preuves sont à connaître.
I.3.1 Proposition
converge.
Preuve
Voir plus haut
I.3.2 Proposition
Soit
.
converge ssi
.
Dans le cas de convergence,
.
Preuve
Le cas
est trivial.
Dans le cas
, on a, pour
,
Or
lorsque
et
lorsque
.
On obtient bien une limite finie ssi
(et on obtient
lorsque
)
I.3.3 Théorème (Intégrales de Riemann)
Soit
.
converge ssi
.
converge ssi
.
sont deux intégrales
divergentes
Preuve
Soit
.
si
et
si
.
Dans le cas
on a donc une intégrale divergente.
Pour
,
. On retrouve bien le résultat annoncé.
Soit
. Le même calcul de primitive vaut encore. Comme
,
diverge.
Cette fois,
et on retrouve le résultat de convergence.
Conséquence directe des deux points précédents.
I.4 Adaptation des outils
I.4.1 Théorème
Soient
et
une bijection de classe
strictement croissante.
et
sont de même nature et égales quand elles convergent.
Preuve
Soient
. On a
avec
.
Ainsi les intégrales convergent simultanément en
et
.
I.4.2 Cas d'un changement décroissant
Si
est supposée décroissante, on a alors
I.4.3 Exemple
Étudier la convergence de
. La fonction
est continue sur
.
Par changement de variable bijectif
ie
(bijectif et
) on trouve une intégrale de Riemann divergente.
I.4.4 Exemple
Convergence et valeur de
.
est continue sur
par composition et inverse.
Posons
pour
(qui est bien
) et donc on a
et
. Alors
.
I.4.5 Théorème
Soient
des fonctions de classe
.
Si
existe et est finie alors
sont de même nature et en cas de convergence
où on a noté
.
Preuve
Immédiat d'après le cours de sup, en passant par des intégrales sur
.
I.4.6 Remarque
On peut étendre ce théorème à
et même à
(dans ce cas le crochet est la différence de deux limites).
I.4.7 En pratique
On reviendra toujours à une intégrale sur un segment
pour effectuer une intégration par parties puis on fait tendre
vers
. En effet, on ne connaît pas a priori la fonction
ni la limite de
.
I.4.8 Exemple
Montrer la convergence et calculer
.
est continue sur
.
Posons
. Alors
qui est une limite finie. Ainsi
converge et vaut 1.
I.4.9 Théorème
Soit
un intervalle de
.
Soit
une fonction continue, positive et telle que
converge.
Si
alors
.
Preuve
Remarquons que si
alors il existe un segment
tel que
.
De plus, comme
est positive,
Or ce théorème est vrai quand
est un segment. Pour
, il suffit d'appliquer le cours de 1ère année pour prouver que
est nulle sur un segment
qui contient
et donc
.
II Preuves de convergence
II.1 Fonctions intégrables
II.1.1 Définition
Soit
un intervalle et
une fonction continue.
On dit que
est
intégrable
sur
ssi
converge.
L'ensemble des fonctions continues et intégrables définies sur l'intervalle
et à valeurs dans
est noté
.
II.1.2 Exemple
Etudier l'intégrabilité sur
de
.
II.1.3 Remarque
Pour les fonction positives ou négatives, l'intégrabilité et le fait que l'intégrale converge est équivalent.
II.1.4 Proposition (Linéarité des intégrales convergentes)
Soient
continues.
Si
convergent toutes les deux alors pour tout
,
converge également et on a
Preuve
Simple retour à la définition. On remplace
par
pour intégrer sur un segment. La linéarité de l'intégrale s'applique alors et le théorème est une conséquence de du théorème de combinaison linéaire de limites finies.
II.1.5 Théorème
Soit
. SI
est intégrable sur
ALORS
converge.
Preuve
Cas
. On traite le cas
, la preuve s'adapte facilement dans le cas
Notons
et
les fonctions qui valent respectivement
ou 0 suivant que
est positif ou négatif. D'après le cours de 1ère année ces fonctions sont continues (en utilisant
)
Alors
et
. Si on suppose que
est intégrable sur
, c'est à dire que
converge.
Montrons que
converge. Comme
,
est une fonction croissante (sa dérivée est positive) .
De plus,
(car
) et donc pour
,
(car
). Ainsi
est croissante et majorée donc possède une limite finie en
.
Ainsi
converge. Comme
,
converge par combinaison linéaire.
Cas
. Notons
la forme algébrique de
. Alors
. Par comparaison de fonctions à valeurs positives (voir théorème suivant),
sont d'intégrales convergentes sur
et donc
aussi.
II.1.6 Exemple
Montrer que
converge. Le module de l'intégrande est une fonction de Riemann de référence.
II.2 Comparaison
II.2.1 Théorème (Comparaison)
Soient
des fonctions continues.
Si
au voisinage de
et
est intégrable sur
alors
est intégrable sur
.
Si
et
est intégrable sur
alors
est intégrable sur
.
Si
et
est intégrable sur
alors
est intégrable sur
.
Si
alors
est intégrable sur
ssi
est intégrable sur
.
Le résultat vaut encore pour des fonctions définies sur
, à condition de prouver des relations de comparaison (ou une inégalité) en
.
Preuve
Plaçons nous sur un intervalle
où
. Les intégrales
et
ont la même nature.
Pour
on a, par croissance de l'intégrale sur un segment (on intègre ``dans le bon sens''),
. Or
est croissante et possède une limite finie, donc est toujours inférieure à cette limite.
Ainsi
est croissante (
) et majorée donc possède une limite finie en
(la borne supérieure de son intervalle de définition).
Ainsi
converge (et est
) et donc
converge.
Dans le cas où
on a
au voisinage de
pour un
fixé.
Par produit d'une limite par une constante,
converge et par la point précédent,
converge.
On a dans ce cas
On a dans ce cas
.
II.2.2 Négligeabilité
Si on a
et
converge (avec
une fonction positive de référence) alors
converge. Dans la pratique, on utilisera très souvent ce fait.
Exemple :
donc
converge par comparaison de fonctions positives.
II.2.3 Divergence
On peut tout à fait appliquer les contraposées des points 1 et 2 pour prouver la divergence d'une intégrale d'une fonction positive.
Par exemple, si
et
diverge (avec
positive, fonction de référence), alors
n'est pas intégrable sur
(raisonnement par l'absurde).
II.2.4
En 0
Pour la convergence en 0, si
ou plus généralement
pour un
fixé alors l'intégrale de
converge en 0.
En
si
ou plus généralement
alors l'intégrale de
converge en
.
De manière plus générale, si on peut déterminer
en fonction de la valeur de
alors on pourra souvent conclure sur la convergence en 0 ou en
.
II.2.5 Application à la preuve de divergence
En
comme en
, si on a
on peut conclure à la divergence de l'intégrale de
, une fonction positive ou négative. Par exemple
diverge.
II.2.6 Exemple
Discuter suivant la valeur de
la convergence de de
.
On pose
qui est continue sur
dans le cas général (pas en 0, à cause du cas
). Alors
car
.
Ainsi l'intégrale converge en
par comparaison de fonctions positives.
En 0, on a
. L'intégrale converge ssi
d'après le théorème précédent et par comparaison de fonctions positives.
II.2.7 Exemple
Montrer (enfin !) que
converge.
Le calcul de la valeur est un exercice classique.
Preuve
Voici une preuve en plusieurs étapes.
Montrons que
(avec égalité seulement en 0).
Remarquons d'abord que
est dérivable sur
, ce qui nous permettra d'utiliser l'inégalité des accroissements finis sur
ou
. De plus sa dérivée est
qui est décroissante sur
Si
, on a
ce qui donne
qui est CQFD.
Si
, on a
ou encore
ou encore
car
.
Soit
et
, on a alors
et donc
et
.
Ainsi,
. En passant à l'exponentielle qui est croissante,
La relations qui précède est encore vraie pour
, et en intégrant on obtient :
En posant
dans
(possible d'après les valeurs prises par
), on a
et donc
.
En posant
dans
on obtient
car
.
Si on note
(par changement de variable
),
on a
(car on intègre une fonction positive sur un segment plus petit) et donc
D'après l'étude des intégrales de Wallis,
et par encadrement
.
II.2.8 Proposition
est un
-espace vectoriel : toute combinaison linéaire de fonctions intégrables est encore intégrable.
Preuve
La fonction nulle est clairement intégrable sur
et son intégrale vaut 0.
Soient
et
. Montrons que
est encore intégrable. Comme
on peut utiliser la linéarité des intégrales convergentes pour conclure.
III Exemples importants
III.1 Application aux séries numériques
III.1.1 Théorème
Soit
(avec
) une fonction
continue, positive et décroissante.ê
Preuve
Pour un
on a, (voir le schéma. La preuve est la décroissance de
et la croissance de l'intégrale, puis on somme des inégalités et on applique la relation de Chasles),
Remarquer les bornes des intégrales, en lien avec le domaine de définition de
Ainsi la suite des sommes partielle est majorée ssi
est majorée (il suffit de majorer les valeurs aux entiers car cette fonction est croissante).
III.1.2 Exemple
On prouve de cette manière la convergence et la divergence des séries de Riemann.
III.1.3 Application aux séries divergentes
On souhaite donner un équivalent de
.
Or, pour
,
car
est croissante sur
et sur
.
En sommant de
à
on obtient
ie
.
On en tire classiquement
.
III.1.4 Restes d'une série convergente
On cherche un équivalent de
. Avec
on a (cf DM)
et donc
où
.
représente en fait la qualité de l'approximation de
par la somme finie
.
Pour
(on fixe
pour l'instant), on a classiquement
et en sommant de
à
,
.
Or
et donc
(multiplier l'encadrement par
+ théorème d'encadrement).
III.2 Intégrales classiques
III.2.1 Fonction
Reprenons
II.2.6
. On pose, pour
,
.
Donnons un lien entre
On a, pour
,
.
Comme le crochet tend vers 0 en
(
) et que les deux intégrales considérées sont convergentes d'après l'étude de
II.2.6
,
De plus,
et par récurrence immédiate,
.
III.2.2 converge mais diverge
Comme pour les série numérique, ce n'est pas parce que
n'est pas intégrable que l'on peut déduire la divergence de l'intégrale de
. Voir les exemples de séries convergentes mais pas absolument convergentes. Nous allons démontrer le résultat
Posons
qui est continue sur
. On veut montrer que l'intégrale de
sur
converge mais que
n'est pas intégrable sur
.
Montrons que
converge.
par quotient d'équivalents et donc
est prolongeable par continuité en 0 et
converge.
Pour l'intervalle
, nous allons effectuer une intégration par partie. Soit
. Posons
et
qui sont
sur
. Alors
et
convient. Par intégration par parties Nous avons deux limites à étudier.
Premièrement
et donc
par encadrement.
Deuxièmement,
est intégrable sur
car
et
converge et par comparaison à une fonction positive. Ainsi
possède une limite finie lorsque
.
Par somme,
possède une limite finie lorsque
ie
converge.
Finalement,
converge. Coin culture : cette intégrale s'appelle intégrale de Dirichlet et vaut
, fait qui peut faire l'objet d'un problème.
Montrons que
n'est pas intégrable sur
. Supposons au contraire que
converge et donc que
converge.
Soit
. Notons
(il s'agit d'une suite convergence d'après notre hypothèse). On a
Soit
⟦⟧
et
. Alors
et par produit par
,
.
Ainsi, par croissance de l'intégrale
De plus, si
est pair,
et si
est impair, alors
.
Ainsi, par somme d'inégalités,
.
On reconnaît une somme partielle de la série harmonique (privée de son premier terme), qui est notoirement divergente, ie
. Contradiction.
III.2.3 converge mais
Nous n'avons pas de critère aussi facile que la divergence grossière des séries pour les intégrales. Montrons que
converge.
est continue sur
. Posons
et donc
(ce qui prouve que le changement de variable est bijectif). Alors
et notre intégrale à la même nature que
. D'après le point précédent,
converge.
Cependant,
ne possède pas de limite en
(car
n'a pas de limite en
.)